Les cellules souches pluripotentes 'IPSC's
un nouvel outil pour les thérapies des cancers. Par Théodoros LATSIS
Les progrès dans le domaine de la biologie des cellules souches ainsi que dans d'autres domaines biologiques et scientifiques ont ouvert une myriade de possibilités qui offrent de grands espoirs dans la découverte de nouveaux traitements, et biomarqueurs pour de nombreuses maladies génétiques, ainsi que les cancers.
En 2012, les professeurs Shinya Yamanaka et John Gurdon ont reçu le prix Nobel de Médecine, pour leur découverte révolutionnaire qu’un ensemble de facteurs de transcription, et protéines pouvaient contrôler la destinée d'une cellule, et d’utiliser certains d’entre eux pour reprogrammer des cellules adultes en cellules souches de type embryonnaires.
Ces cellules reprogrammées correspondent aux cellules souches pluripotentes induites (iPSCs) (Figure 1), et sont très proche des cellules souches embryonnaires dérivées d’un embryon. Ces iPSCs, comme les cellules souches embryonnaires, peuvent donner naissance à presque tous les types de cellules (c'est-à-dire plus de 200) de l’organisme humain.
(Figure 1. Morphologie d’une colonie de cellules iPSC humaines développées dans notre laboratoire à partir de cellules sanguines.)
Cette découverte a ouvert de nouveaux champs d’applications pour modéliser diverses maladies, et reproduire la maladie d’un patient, comme les cancers, pour tester les thérapies ciblées, ou pour utiliser les cellules IPSC humaines pour fabriquer à grande échelle des cellules humaines ou des organes pour réparer des lésions ou restaurer des fonctions défaillantes, pour tuer les cellules cancéreuses ou pour les transplantations d'organes, tout en respectant les principes et exigences éthiques et sécuritaire.
En ce qui concerne les cancers, les iPSC ont principalement été impliqués dans la recherche pour reproduire les tissus cancéreux par une technique de culture 3D que nous avons mis au point au laboratoire.
Ces structures dites organoïdes (Figure 2) permettent d'élucider les mécanismes d’oncogenèse, de transformation et progression des cancers et étudier l'efficacité de nouveaux médicaments. En alliant les étude -omiques (expression génique / analyses de protéines), la bioinformatique et les outils d’intelligence artificielle, les réseaux moléculaires complexes des cellules tumorales sont explorés. Les résultats montrent une très grande hétérogénéité des cancers nécessitant plusieurs traitements combinés avec des actions synergiques.
(Figure 2. Organoïde rénal vascularisé développé dans notre laboratoire à partir d’une cellule iPSC porteuse d’une mutation de c-Met associé à l’adénocarcinome rénal (1))
Les essais cliniques ont été initiés avec les cellules souches embryonnaires humaines depuis 2011 essentiellement dans le traitement des maladies oculaires, maladie de parkinson et pathologie cardiaque avec un premier essai en France. Le tout premier essai clinique utilisant les cellules IPSC a été initié au Japon en 2013 dans la dégénéresence maculaire. Les essais commencent réellement depuis 2018 aux USA, Japon et l’Australie essentiellement dans les cancers.
Ces thérapies prometteuses reposent sur l’injection de cellules tueuses, lymphocytes T et cellules Natural Killer (NK) généré à partir de cellules iPSC et exprimant un récepteur artificiel (CAR) contre une cible spécifique des cellules cancéreuses. Ces thérapies nouvelles nécessitent des standards et tests de qualifications reconnus par les agences réglementaires (FDA, EMA) et nous y avons participé dans un consortium d’experts internationaux (2).
L’Unité Inserm UMR 935/ UA09 est à la pointe de ces technologies avec 2 programmes dans les cancers : Les thérapies vaccinales et Thérapies utilisant les cellules NK et Macrophages avec des nouvelle cibles anti-tumorales.
Je développe les IPSC à partir de sang de patient, et l’équipe génère les organoïdes en vue de découvrir des cibles avec l’apport de la bioinformatique et nous produisons les cellules thérapeutiques. Nous validons ces nouvelles stratégies thérapeutiques dans les Leucémies Aigues, les tumeurs solides agressives (Cancers du sein triple négatif, Glioblastome (3), Adénocarcinomes pulmonaires et pancréatiques).
Ces recherches une fois validées seront transférées dans notre nouveau laboratoire de production CiTHERA au Génopôle d’Evry, pour fabriquer ces biomédicaments innovants à l’échelle semi-industriel (4) en vue d’essais thérapeutiques avec les services hospitaliers en cancérologie. Ces travaux de recherche clinique à partir de ces nouveaux modèles sont essentiels pour poursuivre les découvertes thérapeutiques et amélioration de la vie des patients.
Je tiens personnellement à remercier les donateurs de Vaincre le Cancer pour leur soutien dans ces recherches.
Théodoros LATSIS Ingénieur de recherche, INSERM UA09, ESTeam Paris Sud Campus Villejuif Infrastructure nationale INGESTEM
Références: 1. Hwang JW, Desterke C, et al., iPSC-Derived Embryoid Bodies as Models of c-Met-Mutated Hereditary Papillary Renal Cell Carcinoma, Int J Mol Sci., (2019) 20(19), p. 4867. 2. Sullivan S, Stacey GN, Akazawa C et al., Quality control guidelines for clinical-grade human induced pluripotent stem cell lines, Regen Med., (2018) 13(7), pp. 859-866. 3. Hwang JW, Loisel-Duwattez J, Desterke C. et al, A novel neuronal organoid model mimicking glioblastoma (GBM) features from induced pluripotent stem cells (iPSC), Biochim Biophys Acta Gen Subj., (2020) 1864(4) 4. Manufacturing of induced pluripotent cells and immune cells for adoptive immunotherapy of cancer, Bennaceur Griscelli A., Session Descriptions-NoCode – ISCT 2020 Paris Virtual’. Accessed 25 February 2021. http://www.isct2020.com/session-descriptions-nocode/.