LUTTER CONTRE LA DENUTRITION : UNE AMBITION MULTIDISCIPLINAIRE EN ONCOLOGIE
Par le docteur Bruno Raynard, Chef du service de NUTRITION et SSR site GR2, Chef de l’Unité Transversale de Diététique et de Nutrition, Responsable médicale de GR2 - GUSTAVE ROUSSY – CANCER CAMPUS
Alors que 40 à 70 % des patients sont ou seront dénutris au cours de leur parcours thérapeutique, seul un tiers est pris en charge de façon adaptée et multidisciplinaire en France.
La dénutrition est un facteur de risque majeur de toxicité des traitements anticancéreux ou de complications après chirurgie.
C’est aussi la qualité de vie qui est fréquemment altérée chez les patients dénutris insuffisamment pris en charge. Aucune localisation tumorale, aucun traitement anticancéreux n’échappe à cette réalité qui conduit à une véritable perte de chance pour les patients dénutris s’ils ne sont pas pris en charge. Car la dénutrition n’est pas une fatalité, elle est réversible lorsqu’elle est traitée tôt.
Les preuves scientifiques abondent pour démontrer les bénéfices d’une prise en charge diététique et nutritionnelle individualisée et précoce chez les patients atteints de cancer. Cela passe par un dépistage (repérage de la perte de poids et des difficultés à manger) dès la phase diagnostique, et par un suivi nutritionnel régulier, au moins avant chaque cycle de traitement. La mesure du poids doit être systématique lors de toutes les circonstances qui amènent le patient à l’hôpital. Le patient et ses proches, tous les soignants du domicile ou à l’hôpital, doivent alerter si une perte de poids est constatée. Chaque kilogramme perdu correspond à une perte de masse musculaire, dans le contexte oncologique.
Une diététicienne peut aider le ou la patiente à conserver une alimentation orale suffisante en énergie et en protéines pendant toute la durée du traitement, à condition d’entreprendre ce suivi dès le début du traitement et le plus régulièrement possible.
Aucun régime miraculeux n’existe pour guérir le cancer. Il est donc recommandé de ne pas entreprendre de régime en parallèle des traitements anticancéreux et les diététiciens sont là pour répondre à toutes les questions concernant les croyances alimentaires. Bien au contraire, l’alimentation doit être la plus riche et la plus variée possible pour éviter la perte de poids et les dégouts. La diététicienne la va donc accompagné chaque patient le plus régulièrement possible. Mais cela n’est pas toujours facile. Elle n’impose pas, elle conseille. Elle aide à enrichir chaque mets, et à fractionner les repas pour les rendre moins pénible. La place des aidants est évidemment essentielle dans l’accompagnement à l’alimentation. Le diététicien est aussi présent pour les informer et les former dans ce rôle. La présence de diététiciens en nombre suffisant est donc une des clés de la réussite de ce projet d’amélioration des parcours de soins oncologiques.
Par ailleurs la nutrition ne peut être efficace que si elle se conjugue avec un programme d’activité physique adaptée, une prise en charge psycho-oncologique (et addictologique) et la prise en compte des comorbidités comme le diabète par exemple. Cette vision multidisciplinaire développée très en amont du début des traitements est appelée PREHABILITATION. Validée en préopératoire de chirurgie oncologique digestive, elle se développe maintenant dans des parcours non chirurgicaux comme dans les cancers ORL traités par radio-chimiothérapie ou avant chimiothérapie des cancers digestifs métastatiques.
L’oncologie ne peut plus se faire sans nutrition. La prise en charge d’un patient atteint d’un cancer ne peut plus se passer de la présence d’une équipe dédiée à l’alimentation et à la nutrition. Elle doit intervenir dès le diagnostic et durant tout le parcours, même au-delà de la rémission ou du contrôle de la maladie.
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